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20/02/2011

hey, oh !

Dès le matin, comme la ville est encore endormie et que la colline baigne dans les premiers rayons de soleil, ouvrir larges les fenêtres et siroter ma première tasse de thé dans mon lit, en regardant un film sous la couette ou en bouquinant... voilà un des petits plaisirs minuscules dominicaux à noter dans mon calepin...

Seulement voilà. Ce matin, à la place de ce tableau normal pour un fin de février, j'ai eu droit à ça :

Photo006.jpg

J'ai, évidemment, pensé que je pouvais plus sortir ma bagnole, qu'on allait encore patauger et que les bottes prendraient de l'eau, que mes cheveux allaient friser alors que je passe une demi-heure à les lisser, que...enfin, ça bouillonait, ça turbinait...jusqu'à ce que je me reprenne "calme-toi, Dana, calme-toi" (merci E.E.Schmitt ! ) et que je me mette à regretter le bonheur sans limites que j'éprouvais, enfant, et même plus tard, lorsque les premiers flocons se mettaient à tomber. Le monde était transfiguré et j'affectionais particulièrement le moment éphémère de l'absolu virginité de la couche de neige, avant qu'aucun passant ne s'y aventure, avant qu'aucune bagnole ne laisse traîner derrière elle deux lignes parallèles...

Ainsi, le charme était rompu, la vie recommençait, l'horloge se remettait en marche, mais ces courts instants entrouvaient les portes de l'éternité et j'en étais réconfortée.

En voilà un autre plaisir si ce n'est un regret à inscrire dans le calepin : le regard que je portais, enfant, sur le monde qui m'entourait. Tout était possible, toutes les espérances permises.

Et puis, pourquoi ne plus laisser mon esprit s'enflammer ? Pourquoi ne pas lui octroyer le droit de rêver ? En fin de compte, ce monde est  vivant, véritable, pas un décor de Truman Show, la neige, même froide, n'est que passagère et les crocus et les jacinthes  braveront bientôt l'hiver et  prendront leurs dispositions pour une floraison prochaine.

Bon, je vais sortir ma luge, mes décorations de Noël et mettre une musique requinquante, histoire de m'entraîner pour la séance de zumba de demain et de ne plus entendre le connard qui a choisi l'heure de la sieste pour jouer de la clarinette :

" Hé oh, écoutez ce que je dis
J'ai votre ...
Hé oh, écoutez ce que je dis

Plus je vois, moins je sais
Plus j'ai envie de le laisser aller hey oh

Profondément sous la couche d'un autre merveille parfaite
Là où c'est si blanche comme neige
Divisé intérieurement par un monde laissé en suspens
Et il y a nulle part où aller
Entre la couverture d'une autre merveille parfaite
Et elle est si blanche comme neige  "

Seize the day !

Photo028.jpg

 

 

14/02/2011

te iub...

Oui, je sais, je sais, les mots sont galvaudés, l’amour c’est tous les jours, ce n’est même pas une tradition roumaine, mais, franchement, ça vous dérange qu’on vous le dise et redise, allez, ça suffit de jouer les rabats-joie , toute occasion est bonne pour se rappeler que c’est lui l’énergie qui coule de l’un à l’autre, en nous reliant par un cordon ombilical invisible, c’est lui qui «  meut le ciel et les autres étoiles » , laissez-vous à sa puissance conquérante, à ses ébats brûlants, à son lot de miracles, à son alchimie foudroyante.

 

Alors, les gars, c’est vraiment si dur que ça de prononcer ces deux mots ?

A en croire les mecs qui ont réalisé le clip, «  Cele două cuvinte » ( « Les deux mots ») les hommes ne seraient pas « génétiquement structurés » pour les prononcer ! En outre, ils auraient eu, dans l’histoire, des préoccupations sérieuses : chasser, luter, inventer la roue, l’ampoule, la télé, la veste en cuir...  Mais moi je sais qu’ils peuvent surgir n’importe où, quand on s’y attend le moins, au détour d’un sentier côtier ou dans l’alcôve de la nuit.

 Quoi qu’il en soit, dès qu’on les entend, ça nous érafle le coeur et l’éveille de sa torpeur. Ils se lovent au creux du ventre et nous font vivre de plain-pied avec le merveilleux.

Ne nous laissez pas languir comme une Ophélie errante, les cheveux en bataille, chantant, jamais aussi lucide que dans sa folie : "Demain, c’est la Saint-Valentin/Debout dès les premières heures du matin./Et me voici vierge à ta fenêtre,/Pour être ta Valentine."

 

Allez ! Tous ensemble ! Te iu-besc ! 

 

13:35 Publié dans n'importe quoi | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : taxi

11/02/2011

pour Elisabeth

comme promis, je publie une des poésies de ton volume "Les mots après les autres" paru chez TheBookEdition.

C'est ma première vidéo où j'ai réuni texte, images et son, histoire de mettre à profit un stage récent, alors tu seras indulgente : )

Merci encore pour ton cadeau, il scelle ces quatre ans d'amitié virtuelle, tout en marquant  la quatrième anniversaire de ce blog dont tu as été la première commentatrice.

Les photos sont de moi et de Phileas , souvenir de nos virées en Bretagne...

03/02/2011

backstage

Avant la fin de chaque semestre, on donne l'occasion aux élèves qui n'ont pas la moyenne de passer des interros supplémentaires pour essayer d'y "remédier". Ils sont pas obligés, c'est chacun selon ses envies. Enfin bref, une élève me prie de l'examiner, elle passe au tableau, je lui donne à traduire une phrase des plus simples, genre "les roses de mon jardin sont superbes", je ne me fais aucun souci, c'est tellement simple que ça devient ridicule. Je la laisse réfléchir, une minute, deux, rien...pas un mot. Je bondis, je me lève un peu agacée  et je lui prends le marqueur des mains. A ce moment-là, je sens sa main droite trembler fort...Sans mot dire, j'écris la phrase et je l'invite à regagner sa place, alors que des ressentis et des mots se bousculent dans ma tête "connasse, tu fous la trouille aux élèves maintenant ! ". Je me souviens mes profs de roumain, d'histoire dont on apprehendait l'arrivée, des profs imbus d'eux-mêmes et qui dispensaient leurs cours interminables en dictant d'une voix monotone et sans le moindre souci pour nous, les potaches. Le pire était que l'on devait tout apprendre par coeur et réciter comme des litanies. Des profs isolés, seuls dans leur classe, avec des élèves bien sûr, mais seuls capitaines de la barque, seuls maîtres à bord après Dieu. Ils devaient penser que la classe était le lieu privé où la transmission du savoir relevait d'une sorte de messe pour laquelle un seul officiant suffisait.

Aucun échange, aucune "interactivité" (le mot n'était même pas inventé, je crois...)

Et moi donc ? J'enseigne inlassablement. Je répète à longueur d'année, depuis maintenant plus d'un quart de siècle, presque les mêmes choses. Avec le temps, avec les temps, la passion risque de s'émousser et les réformes successives tendent à niveler par le bas.

Avant, j'enseignais la littérature française. Et même si mes élèves étaient parfois à cent lieus des poèmes dont on devait repérer les synecdoques et les métonymies, même si relever différentes tonalités d'un texte les mettaient sûrement au supplice et qu'ils n'y voyaient aucun intérêt, même pas ludique, je suis persuadée que j'avais, que j'ai eu plus de chances de faire passer aussi quelques préceptes utiles, quelques vérités indispensables (de grands mots, je sais...) et que mon discours frappait leur esprit. Ce qui me paraît de plus en plus improbable à présent, avec des textes sur le chômage, sur les "modèles de base de la société française", sur l'intégration...Ils ne s'en sentent pas concernés et cela les éloigne de moi.

Je les aime pourtant. Je les aimerai. Si longtemps que je partagerai avec eux un peu de cette sensibilité adolescente. Avant que je ne bascule définitivement dans le camp des vieux cons. Car je vieillis, oui, et ils ont toujours le même âge. Leurs mots ne sont plus les miens, leur musique, leurs références culturelles, leur univers donc me semble étrange et étranger.

 En outre, l'anglais s'est imposé et le français décline. Aurai-je de nouveau, un jour, un élève qui gagne le Trophée de la Francophonie avec un essai sur les histoires des...pierres ? Quelle qualité de texte, quelle sensibilité, quelle beauté !

Au vu des regards éteints  de certains de mes élèves, des regards perdus dans le néant de leur ennui, leur aversion de l'effort, leur difficulté à se concentrer, j'ai de forts doutes.

A quoi bon apprendre, me demanderez-vous ? Pour affronter un monde hostile, violent, qui ne les motive pas, qui ne leur donnera pas à manger...Je pense aussi à tout cela. Mais (une idée qui ne peut sortir que de la tête d'un prof ? ) je ne voudrais pas pour autant qu'ils se privent de certaines chances et qu'ils ratent certaines opportunités qui, peut-être, ne se représenteront plus. J'ai aussi tendance à considérer les études comme une possible voie de salut. C'est peut-être faux, mais il me semble préférable de partir à la conquête de ce monde avec un savoir, même avec quelques diplômes en poche plutôt que les mains vides.

Et ces propos d'Iris Murdoch me réconfortent dans ma conviction :

 

" Education doesn't make you happy and nor does freedom. We don't become happy just because we are free, if we are, or because we've been educated, if we have, but because education may be the means by which we realise we are happy. It opens our eyes, our ears, tells as where delights are lurking...convinces us that there is only one freedom of any importance whatsoever : that of the mind, and gives us the assurance, the confidence, to walk the path  of our mind...our educated mind...offers."

Alors, ils m'arrive de pester, de tempêter pour qu'ils fassent plus d'efforts. Je forme pour eux et avec eux des projets qui, le plus souvent, n'ont d'autre vocation que de maintenir mes neurons à flot...

Je doute donner un jour- même si ça doit être tellement jouissif, valorisant - autant de mon temps, autant d'énergie comme la prof de "Freedom Writers"... mais j'aimerais tant libérer aussi en mes élèves des forces, des talents insoupçonnés et, par mes propos, vibrer de temps en temps à l'unisson avec eux...

En relisant cette note, je me rends compte que je m'étais laissé aller à des mots empreints plutôt de découragement. Mais ce n'était qu'un moment de cafard, de spleen vite oublié. Je sais que je continuerai de faire de mon mieux, en tout cas, et si l'on devait décerner une palme de l'assiduité, je pense que je la mériterais ! Vous remarquerez que mon entêtement n'a d'égal que mon ambition (mon orgueil ? )...Quoi qu'il en soit. Sinon, il vaudrait mieux que je m'en aille planter des choux...