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02/10/2011

licence poétique ?

Depuis quelques années déjà, des élèves, surtout des filles, finissent leurs lettres amicales par "je t'espère"... "j'espérerai ton coup de téléphone"... j'ai mis du temps pour comprendre que cela leur venait  des séries sud-américaines qu'elles regardent et où l'on parle espagnol.

Au début, je râlais, mais peu à peu j'ai commencé à affectionner cette formule et à devenir plus indulgente envers son utilisation récurrente.

" Je t'espère" au lieu de "je t'attends"... pourquoi pas ?

On ne vit plus en jachère, tiraillé entre le manque et l'absence, les yeux rivés sur un écran de portable ou d'ordinateur

On n'est plus "celui qui n'a plus personne et qui s'endort près de son téléphone"

On n'est plus le soldat qui compte les jours jusqu'à sa libération

On n'est plus le condamné dans l'attente du sursis

On n'est plus le nomade qui s'ennuie de son chemin

On n'est plus Pénélope obligée d'inventer des ruses pour décourager les prétendants

On n'est plus cette attachante Mme Butterfly animée par un amour profond que l'absence prolongée de Pinkerton n'a guère essouflé

On troque une terre en friche contre celle des espoirs fleuris

On devient l'enfant qui écrit au père Noël

La femme qui deviendra bientôt mère...

Selon Kundera, on pourrait nous ranger en quatre catégories selon le type de regard sous lequel on veut vivre. La quatrième, la plus rare, est celle des rêveurs. Ceux qui vivent sous les regards imaginaires des êtres absents.

Le rêve n'est pas un manque, mais un encouragement, un apaisement, une douceur. On s'y installe, on y habite  puisque souvent le rêve est la vie même lorsqu'elle se fait offrande, qu'elle nous sème, qu'elle nous cueille.

Les mots s'écrivent alors sur la peau

La joie se lit au coin des yeux

L'amour se dessine au gré des mouvements de nos corps

Je m'ennuie de toi ? Tu me manques ?

Non.

Je rêve de toi.

Je respire le parfum de ton existence que je sens de si loin.

Je t'espère...

 

 

 (vous l'aurez remarqué, mes comms ont de nouveau disparu, je suis lasse de persévérer avant que je ne trouve une solution...)

 

 

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Commentaires

Je la trouve très belle, cette formule. Je crois, mais il faudrait que j'aille vérifier (mais il fait trop chaud...) qu'elle était utilisée, ou quelque chose de proche, par les grands épistoliers français du 17ème et du 18ème siècle. Cela dit, oui tu as sûrement raison, ça ne doit pas être la source de tes élèves.
Mais c'est très beau.

Écrit par : laplumequivole | 02/10/2011

Jolie réflexion!
espera j attends j'espère
j'attends espérer
j'espère de ne pas attendre

Écrit par : pictorus | 03/10/2011

c'est intéressant et joli. Je ne connaissais pas cette "évolution" n'ayant pas d'enfant et ceux que je fréquentes sont soient bien plus âgés ou au contraire bien trop jeune pour parler de la sorte. Mais c'est vrai que je t'espère dans le sens d'attendre à quelque chose de plus poétique, de moins négatif. On sent dans le mot attente comme un reproche alors que dans "espère" un espoir, une élévation.
Bises

Écrit par : harfang | 03/10/2011

Ca me fait penser à une phrase dans la chanson très cèlèbre de Laura Pausini 'La Solitudine', qui m'avait frappé il y a quelques années. Elle dit à son amoureux qui est parti loin d'elle : "Chissà se tu mi penserai ?" alors que même en italien la tournure logique serait "...se penserai a me" ou éventuellement "...se avrai un pensiero per me". L'inversion grammaticale remet joliment les choses en perspective. "Penserai a me" sous-entend "tu ne m'oublieras pas, je veux rester présente dans tes pensées" mais suggère tout de même une intermittence. "Mi penserai" laisse suggérer qu'elle voudrait l'habiter entièrement, dans son esprit. Son amoureux devrait l'envisager, la dessiner, l'appréhender sans cesse dans sa tête. Ce qui d'ailleurs est dit aussi, dans d'autres vers de la chanson. C'est de l'amour (ou plutôt 'un désir d'amour') un peu fou, mais ce sont des ados dans la chanson, donc c'est mignon.

Au fait, à tout hasard :

http://www.youtube.com/watch?v=B5Ouhzax96M

Baci, Dana mia. Ti penso, ti penso ! :D

Écrit par : Lancelot | 03/10/2011

J'aime beaucoup mais surtout ce que tu en as fait du coup, tu as le chic pour écrire les sentiments indéfinis

Écrit par : Bougrenette | 03/10/2011

Dana, tu es une fille passionnée et passionnante.. J'aimerai t'avoir comme prof...comment fais-tu pour écrire un pareil texte simplement en remarquant des filles qui disent :" je t'espère..."
Il est vrai que ce mot : je t'espère, n'est pas très positif...
Bises Dana et bonne nuit.... j'attends désespérément la pluie...

Écrit par : loula | 04/10/2011

tiens Loula dit exactement le contraire de ce que j'ai écrit... comme quoi chacun voit midi à sa porte, c'est très amusant ;)

Écrit par : harfang | 05/10/2011

bises et bon WE ;)

Écrit par : harfang | 07/10/2011

Je t espére: pourquoi pas. J ai reçu un mail d un Suisse alémanique "Si cette entreprise ne vous dette rien, alors il ne faut pas nous remplir les papiers que nous vous avons envoyé. Voilà un beau verbe qui serait bien utile dans ces temps difficilles "Je dette , vous dettez" Ah mais ce Monsieur devrait envoyer une demande de dépot de brevet pour avoir trouvé une si belle utilisation de ce mot.
Bonne journée Dana
Latil

Écrit par : Latil | 09/10/2011

Une époque formidable où l'on peut communiquer facilement. Et je ne t'aurais pas connue s'il n'y avait pas Internet....
Je t'espère : c'est une formule que j'avais mise dans un de mes poèmes. (la fille aux cheveux d'or, quand elle s'endort..... elle l'espère...)

Écrit par : elisabeth | 09/10/2011

Plume > Alors, tu as vérifié ? Non, je l'ai expliqué, elles font juste un transfert de l'espagnol où "je t'attends" si dit "te espero".

pictorus > Sourire. "J'espère de ne pas attendre" mieux que "j'attends de ne pas espérer".

harfang > Comme je viens de l'écrire, il s'agit juste d'une méprise, d'une confusion de mes élèves qui regardent des séries en espagnol, et j'en ai profité pour alimenter mes élucubrations !

Lancelot > Tu es trilingue alors ! Et amoureux de l'italien comme moi. Cette injonction que j'on sente, ou crois sentir dans le texte, me fait penser à Meredith de l'Anatomie de Grey ( j'ai des références aussi, tu vois; ) ) lorsqu'elle dit à son docteur "love me ! choose me ! ", là aussi je sens un "Me" avec majuscule".

Ti penso anch'io, anche io bacci !

Bougrenette > Disons que ce sont mes élèves qui m'ont donné le "la" !

loula > Comme harfang, j'ai remarqué ta perception différente de la nôtre par rapport à l'espoir, n'empêche, c'est beau , tu me fais penser (encore) à F.Dard qui écrivait "le bonheur que l'on poursuit sans l'atteindre s'appelle espoir"...

Latil > Ah, toi et tes anecdotes savoureuses !
Les langues n'arrêtent d'évoluer, et nous de leur faire des enfants dans le dos. Ma fille, du fait de ne parler que rarement sa langue maternelle a, à présent, une drôle de façon de franciser des mots roumains ou de "roumainiser" des mots français.

elisabeth > C'est vrai que l'Internet a favorisé des rencontres inenvisageables il y a dix ans. Tu me donnes une idée de devoir pour mes élèves.
J'étais aussi une fille aux longs cheveux d'or ; )

Écrit par : Dana | 09/10/2011

Les commentaires sont fermés.